Ven Ra : « Ils voulaient me manger »

Nous avons rencontré Ven Ra, Jérôme Porier et moi-même, durant l’été 2003, alors que la campagne pour les élections législatives au Cambodge battait son plein. Ven Ra est la nièce de Ta Mok, que l’on surnommait le boucher, pour son rôle joué durant ce moment de démence collective mené par Pol Pot qui fit deux millions de morts. Au moment où les Khmers rouges entraient dans Phnom Penh, Ven Ra était une toute jeune fille âgée de 13 ou 14 ans. A la chute du régime en 1978, elle était devenue infirmière. Sur le point d’accoucher alors que les forces vietnamiennes prennent le contrôle du pays, elle a du fuir en catastrophe dans la jungle, son bébé sous le bras, accompagnée de sa tante malade. Son témoignage, alors qu’elle est candidate pour le poste de député de la région de Pailin, ancien fief des Khmers rouges tout au long de la guérilla qui dura jusqu’au cessez-le-feu et la reddition de décembre 1999, illustre la complexité profonde de la situation historique des Khmers. Le mouvement Khmers rouges fut tout à la fois le pire moment de leur histoire et l’expression du rêve de renaissance de la grandeur passée du royaume d’Angkor qui les hante toujours.

En bonus, ce petit travail de mémoire sur le génocide des Khmers rouges. Film intitulé « Figues absentes »


2 comments for “Ven Ra : « Ils voulaient me manger »

  1. Lech Brigitte
    17 février 2011 at 16 h 36 min

    Merci David pour ces moments de mémoire sur le genocide des Khmers
    rouges . Cela m’obsède , pas seulemnt parce que je suis allée au
    Cambodge , mais aussi parce que je n’arrive pas à faire le lein avec ce peuple , qui au quotidien semble paisible et doux…

  2. David Prud'homme
    22 février 2011 at 10 h 57 min

    Je n’ai bien sûr pas de réponse à cette question. Mais en discutant avec les plus jeunes, on devine qu’eux non plus ne sont pas en mesure de comprendre. Le plus souvent, ils n’ont rien à dire. Le Cambodge vit dans le souvenir de la grande nation qu’elle fut, dominant toute la péninsule, étincelante, dont la prodigieuse Angkor constitue une référence inégalable. Et les Khmers rouges ont peut-être cherché à renouer avec la grandeur passée en commettant l’impensable, en se comportant comme si le Cambodge était hors du temps et des règles. Un délire collectif hallucinatoire en somme. Ils ne peuvent pas l’expliquer, ils ne peuvent même pas s’en souvenir. Le travail de Rithy Panh est en ce sens absolument remarquable.

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