Lawrence Lessig : les creatives commons sont les choses les mieux partagées

Professeur de droit à Harvard, enseignant les « lois du cyberespace », Lawrence Lessig est un pionnier, il est le premier juriste a avoir créé du droit en proposant aux internautes d’adopter de nouvelles règles de protection des oeuvres. Lawrence Lessig est connu pour être l’inventeur et le promoteur des licences Creative Commons en passe de devenir un standard chez les amateurs qui ne font pas enregistrer leurs œuvres auprès des syndicats ad hoc. Lessig fonde son raisonnement sur une opposition entre les pratiques de la côte Est (East Code) et celles de la côte Ouest (West Code) des Etats-Unis. A l’Est se tient le siège de l’autorité juridique classique, donc, par conséquent, celle qui protège les droits et la propriété intellectuelle des majors. A l’Ouest, Lessig constate l’émergence d’une nouvelle forme de codes, celle qui naît de l’écriture de programme informatique. L’informatique permet de codifier les échanges entre machines, donc individus, d’empêcher ou d’autoriser telle transaction selon des règles fixées par la communauté d’utilisateurs.

Des lois du cyberespace…

Le travail de Lessig fait écho aux écrits de Hakim Bey car il reprend l’idéal pirate (ou anarchiste, pour parler en des termes plus « européens ») – ainsi paraphrasé par Lessig : « We reject : kings, presidents and voting. We believe in : rough consensus and running code » – mais en en explicitant l’actualité : « government would not regulate cyberspace [because] government could not regulate cyberspace ».

Il n’y a de choix que dans la mesure où la régulation par le code juridique n’a plus la même efficience que dans la régulation des affaires du monde physique. Le choix de Lessig est de poser une forme d’équivalence entre code juridique et code informatique. Et de faire de cette équivalence une forme politique. En ce sens, Lessig fait le lien entre les hackers comme Hakim Bey, Eric S. Raymond ou Richard Stallman et les usagers comme John Perry Barlow et sa déclaration d’indépendance du Cyberespace.

… aux nouvelles lois de la culture

Mais le propos de Lessig va beaucoup plus loin encore. Ses cinq ouvrages (Code, The Future of Ideas,  Free Culture, Code V2 et Remix) explorent les modes de transformation de

la culture humaine au-delà des règles connues. Sa conception de la culture en réseau relie entre elles toutes les couches présentes dans ce recueil : celle de l’idéal bricoleur de Vannevar Bush (« il existe une machine qui… »), celle des machines communicantes de J.C.R. Licklider (« il existe un langage qui… »), celle des réseaux de machines de Vinton Cerf (« il existe un réseau qui… »), celle des liens et des pages de Tim Berners-Lee (« il existe une toile… »), donnant à cet ensemble un liant que l’on retrouve

exprimé chez Hakim Bey ainsi : « “la culture est notre nature”, et nous sommes les chasseurs/cueilleurs du monde de la TechnoCom ».

Lawrence Lessig, ancien assistant d’un juge à la cour suprême des Etats-Unis, vient comme par anticipation offrir la reconnaissance de Washington à ce nouvel état, issu de la Silicon Valley, un état dont l’indépendance se prouve par le fait qu’il promulgue lui-même les nouvelles lois de la culture. Bien entendu la lecture de Lessig est polémique, mais elle offre à ces « batailles de l’Internet » des clefs de lecture inédites issues de la philosophie du droit, et ajoute un degré de profondeur au débat sur la propriété intellectuelle trop souvent binaire. Il n’est pas non plus complètement déplacé de voir en Lessig, un Jefferson ou un Madison de l’Internet. Comme eux, il aura tenté de forger les nouveaux outils de la liberté qu’il promeut.

Lawrence Lessig, Code V2, 1999, 2006, Basic Books

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