Licklider : « Et si on faisait un réseau intergalactique ? »

Les deux auteurs furent tour à tour directeur de l’IPTO ((Information Processing Technology Office, ce que l’on pourrait traduire par Bureau des technologies de traitement de l’information), une division de l’ARPA (Agence pour les projets de recherche avancée, elle-même créée comme successeur de l’OSRD que dirigeait Vannevar Bush), qui deviendra la DARPA). C’est une intuition de J.C.R. Licklider émise au début des années 60 qui est le point de départ de tout ça.

Chargés de travailler sur le time sharing – des outils de gestion et de partage du « temps machine » -, les auteurs se sont aperçus que les utilisateurs de ces outils ne se contentaient pas des échanges minimaux mais qu’ils profitaient de l’occasion pour se poser des questions de toute nature. Très vite Licklider évoque l’idée d’un « réseau intergalactique » qui réunirait une communauté d’utilisateurs. La « vision » de Licklider est si forte, si originale que non seulement elle sert de programme à l’IPTO mais qu’il obtient de son ministère de tutelle, la création de trois chaires de Computer Science dans les universités américaines.

« Produire des images cohérentes de situations mal comprises »

Le propos du texte de Licklider et Taylor est de reformuler la question de la communication en face à face en des termes qui soient compatibles avec les avancées des Computers Sciences du moment. Le texte est donc à mi-chemin entre la philosophie du langage et la mise en place de protocoles de communication en réseau qui verront le jour dans les dix années qui suivent.

Joseph Carl Robnett Liklider (1915-1990) à gauche avec Al Vezza

Les deux hommes souhaitent montrer que certes les machines sont imbattables pour « gérer les paies, tenir les comptes bancaires, calculer la trajectoire des satellites, contrôler les processus répétitifs des machines et maintenir toutes sortes de lignes de crédits et de débits », mais leur fonction la plus intéressante serait plutôt de « produire des images cohérentes de situations mal comprises » (« make coherent pictures of not well understood situations »).

Si la machine est capable de trouver sa place dans la résolution de problèmes de ce genre, alors et seulement alors, expliquent-ils, on assistera à la mise en place de réseaux d’ordinateurs de plus en plus larges. Et les communautés d’utilisateurs « will be communities not of common location, but of common interest. In each field, the overall community of interest will be large enough to support a comprehensive system of field-oriented programs and data ».

J.C.R Licklider and Robert W. Taylor, The Computer as a Communication Device, 1968, Science And Technology

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *